La réaction d’Apple au projet de loi a, par réaction, intéressé les Américains à la “petite loi” des francais. Et si la firme à la pomme, soutenue par le gouvernement américain, a roulé des gros yeux face à la menace potentielle d’une obligation d’interopérabilité, quelques journalistes/bloggers américains ont une vision différente.
Note préliminaire : la vision de certains bloggers / journalistes peut sembler “angélique” par rapport au projet de loi qui appelle bien des critiques. Mais c’est bien l’article 7 et son obligation d’interopérabilité qui font “buzzer” la loi DADVSI aux USA, d’où ces jugements parfois un peu univoques sur les bienfaits supposés de la loi DADVSI.
The Mac Observer, 24 mars : (lien sur l’entretien complet)
La loi francaise sur les DRM peut avoir un impact mondial [eng]
“Je crois qu’on se focalise beaucoup sur Apple, mais ce n’est que la “pointe de l’iceberg” des DRM en général” déclare William Hart, expert en propriété intellectuelle du bureau new-yorkais de Proskauer Rose LLP. “Tous les producteurs et diffuseurs de contenus sont concernés, pas seulement par la loi française, mais par la reflexion nécessaire sur les moyens de diffuser leurs contenus à la plus grande audience possible, sans mettre ce contenu à la merci du “cauchemar” de la copie numérique”
David Lazarus, San Francisco Chronicle, 26 mars :
Apple not happy, but French may be on right track [eng]
Apple a désigné cette loi comme un “incitation d’état au piratage”. Les avocats des consommateurs ne sont pas d’accord.
“Ce n’est pas une incitation au piratage”, d’après Gigi Sohn, présidente de Public Knowledge, un groupe de reflexion sur les droits numériques. “C’est une incitation à la compétition, ce qui explique pourquoi Apple n’aime pas ca”. Elle a estimé que la loi française était “un grand pas dans la bonne direction“.
[…]
Jeff Chester, directeur exécutif du Centre pour la Démocratie Numérique à Washington, estime qu’Apple, en s’opposant à la loi francaise, agit par pur intérêt. Il met Steve Jobs au défi de prouver que leur réaction est motivée par la lutte contre le piratage.
“Ils essaient juste de tirer un maximum de bénéfices”, déclare-t-il. “Jobs sait parfaitement qu’à long terme, le contenu culturel numérique sera disponible sur toutes les plateformes.“.
Jason Schultz, directeur de l’équipe de l’EFF (Electronic Frontier Foundation) à San Francisco, dit que la loi francaise revient finalement à proposer le choix au consommateur et à améliorer la compétition, ce qui ne peut avoir qu’un effet positif sur le marché.
“Plus les gens pourront transférer leur contenu d’un lecteur à l’autre, plus de périphériques multimédia seront vendus. Vous pourrez avoir un lecteur à la maison, un autre dans votre voiture, et ils n’auront pas nécessairement besoin d’être les mêmes”.
Joe Kraus, co-fondateur de DigitalConsumer.org, un groupe d’avocats, comprend pourquoi Apple serait contre l’interopérabilité des DRM : “Celui qui possède la plus grosse part de marché essaiera toujours de la tenir aussi longtemps qu’il peut. Il a le plus à perdre. Mais le mieux pour les consommateurs, c’est de favoriser un marché juste et ouvert“.
En supposant que la loi francaise soit appliquée, la question est maintenant de savoir si Apple se conformera à la loi ou bien choisira de fermer iTunes en France.
Mais la question brûlante est : Est ce que ca pourrait arriver chez nous ? [NDLR : aux USA]
Tous les avocats avec qui j’ai parlé m’ont dit la même chose : non. Non, sans une remise en cause du Digital Millenium Copyright Act de 1998, qui interdit la manipulation des mesures anti-piratage dans les logiciels commerciaux.
D’après eux, il faudrait un sacré courage politique pour y arriver.
Vous savez, du courage politique, comme ils en ont en France.
Voilà qui devrait faire plaisir aux députés qui ont lutté pied à pied, jusqu’au bout de la nuit, pour arriver à faire voter ces fameux amendements !
Rob Pegoraro, Washington Post, 26 mars : France Takes a Shot at ITunes [eng]
À long terme, essayer de stopper un format propriétaire grand public d’être supplanté par des outsiders doués et motivés revient à pousser de l’eau avec une éponge. Si les législateurs ne forcent pas Apple à déverrouiller iTunes, les hackers le feront. Et quand ils y seront parvenus, il y a de grandes chances que cette libéralisation balaie tous les contrôles anti-piratages.
Leander Kahney, Wired News, 22 mars : How France Is Saving Civilization [eng]
La nouvelle loi française forcerait Apple à ouvrir l’iPod et iTunes à la compétition – et c’est une bonne chose à long terme pour les consommateurs.
[…] Pour beaucoup, la France semble injuste pour Apple […]
Mais les parlementaires francais voient, au-delà d’Apple, arriver le temps où la plupart des contenus culturels seront en ligne, un mouvement qui aura de grandes conséquences pour les consommateurs et la culture en général. Les législateurs francais veulent protéger le consommateur du monopole d’une ou deux compagnies qui voudraient verrouiller la culture, de la même facon que Microsoft verrouille aujourd’hui le marché de l’informatique domestique.
Financial Times, 20 mars : France drafts copyright law to open up iTunes [eng]
“Il est inacceptable que […] le verrouillage soit contrôlé par un monopole. La France est contre les monopoles” a déclaré Martin Rogard, un conseiller du Ministère de la Culture [NDLR : responsable du pôle multimédia du MCC]. “Le consommateur doit pouvoir écouter la musique qu’il a acheté sur toutes les plateformes”.
M. Rogard estime “important” que la France mène ce combat, mais espère que ce n’est que le début d’un mouvement européen pour libérer la musique numérique.
Voir aussi le billet (en anglais) de Tristan Nitot sur le sujet :
French law, Copyright, our digital future and the iPod [eng]
Vecam retrouve certaines déclarations qui rappellent le fond du problème : on ne résiste pas au plaisir de citer à nouveau le professeur Bernt Hugenholtz, conseiller européen pour les droits d’auteurs :
En fait, la Directive ne fait pas grand chose pour les auteurs. Elle est orientée dans le sens de la protection des droits et des intérêts de majors de l’industrie de l’information (producteurs, médias et utilisateurs institutionnels), mais pas dans celui des auteurs qui fournissent le “contenu” qui fait vivre ces industries. La Directive est incapable de protéger les auteurs et les interprètes face aux appétits des éditeurs et des producteurs, qui leur imposent des formes de contrats “tout en un”, une pratique sauvage qui devient monnaie courante dans le monde du multimédia.
Source : http://www.ivir.nl/publications/hugenholtz/opinion-EIPR.html
C’était écrit en 2000, quatre ans après la promulgation de la directive européenne, 6 ans avant le débat de la loi DADVSI. Cherchez l’erreur…
C’était écrit en 2000, quatre ans après la promulgation de la directive européenne, 6 ans avant le débat de la loi DADVSI. Cherchez l’erreur…
Euh oui, l’ : l’ 2000, c’ 4 ans après 1996… donc 1 an avant EUCD, directive européenne en gestation à cette époque !
Vous vouliez sans doute évoquer le traité de l’ de 1996 ?
Commenté par Aldoo — 27 mars 2006 @ 10 h 26 min